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samedi 10 novembre 2012

Comment gerer les fatalites ?

M. Michel Demouchy, expert français en aménagement et en gestion des eaux pluviales, a animé, hier matin, une conférence au siège de la wilaya d'Alger.

M. Michel Demouchy, expert français en aménagement et en gestion des eaux pluviales, a animé, hier matin, une conférence au siège de la wilaya d'Alger.

Cette conférence avait pour propos l'exposé des similitudes entre les inondations du sud de la France et la catastrophe d'Alger du 10 novembre dernier, la gestion préventive des eaux pluviales dans les nouvelles villes et les solutions alternatives qui en découlent.

Les principales problématiques dégagées par le conférencier s'articulaient autour des contraintes d'une gestion rationnelle des eaux pluviales, et donc des risques encourus, et l'impact des configurations sociales, culturelles et urbanistiques sur les tentatives de prévoir et prévenir les crues et inondations.

L'extension des ensembles urbains, comme c'est le cas de la ville d'Aix-en-Provence, au-delà des limites des zones inondables pour des raisons de rentabilité accrues encouragées par les collectivités locales, est facilitée, selon M. Demouchy par « la perte chez les habitants et les décideurs de l'idée d'une catastrophe possible ». Ce qui impose une « situation paranoïaque » : « Nous sommes conscients des risques de par les catastrophes passées, mais nous ne retenons pas les leçons », explique en substance l'expert.

Abordant les difficultés de mettre en place un système efficace de prévention des crues, M. Demouchy a évoqué l'exemple de la ville de Nîmes, qui, de par sa configuration géographique, est souvent sujette à des épisodes pluvieux assez importants. Des pluies de 200 millimètres ont vite eu raison des systèmes traditionnels d'évacuations des eaux pluviales, c'est-à-dire les égouts et les canalisations souterraines. Les services techniques de cette ville ont alors pensé à créer des bassins d'orage en amont, mais cela impliquait un processus difficile à boucler : trouver les bons terrains, exproprier des habitants, se débrouiller l'argent nécessaire, etc. « Mais lorsqu'il n'y a pas de pressions, et en l'absence de courage politique, on ne peut avoir de crédits », a souligné le conférencier. L'exemple de la catastrophe du village de Vaison-la-Romaine qui a connu des inondations meurtrières au milieu des années 90, renseigne sur l'impact des configurations sociales sur la prévention des risques. « Jamais un ancien habitant de ce village n'irait construire en aval ou en amont du passage de la crue, ce qui n'est pas le cas des nouveaux locataires qui ne connaissent pas ou peu la géographie des lieux », indique l'expert. Cette catastrophe a poussé le ministère français de l'Environnement et les autres instances à revoir leur politique d'aménagement : « Il fallait revoir les Plans d'occupation des sols trop laxistes et entamer la réflexion autour du concept des zones d'extension des crues ».




Maintenant, quels sont les systèmes alternatifs pour la gestion des eaux pluviales et des crues dangereuses en dehors des procédés classiques tels que les réseaux d'évacuation par canalisations ? M. Demouchy cite le cas de la réalisation, en 1973, d'une nouvelle ville dans le sud de la France, Vitrolles et dont il a participé au projet en tant que paysagiste, urbaniste, aménageur des espaces verts et experts en gestion des eaux pluviales. En prévision des pluies torrentielles, il a été procédé à des études de terrains afin de réaliser 17 bassins d'orage avec une capacité de stockage de 200 m3. Ces bassins ont été aménagés de manière graduelle en fonction de l'extension des ensembles d'habitations et en remontant la chaîne des bassins versants. Ces structures s'intègrent dans le paysage urbain puisqu'il s'agit de vélodrome, de parking, de square, d'espaces verts, etc. « C'est beaucoup plus efficace, et de loin, qu'un gros réseau de tuyaux », appuie-t-il. Mais ce type de solutionnement n'est pas applicable aux villes anciennes comme par exemple Marseille et Alger.

De la catastrophe de Bab el-Oued, Michel Demouchy s'est dit frappé par les pentes extrêmement raides des vallons en amont. « Les coefficients de ruissellement devaient être des plus maximaux », a t-il estimé tout en préconisant d'agir sur la vitesse de concentration des eaux des parties hautes vers les parties basses, ce qui devrait faire gagner du temps aux secours et aux dispositions d'urgence. Puisque après son inspection des toutes nouvelles canalisations installées sous l'autoroute de Chevalley à Triolet, l'expert français a considéré que l'eau, ainsi, gagnerait plus de vitesse dans son écoulement. Ainsi, il est important de prévoir un système de traitement de cet écoulement en aval qui soit capable d'absorber toute cette eau très vite.


De Chevalley a la Grande Poste


« Mais ici on ne peut se contenter d'un réseau de canalisation classique », a précisé M. Demouchy. La solution proposée par l'expert, qui se dit moins au courant que les Algérois, mais qui s'exprime en tant qu'observateur, est de favoriser l'écoulement en surface des eaux pluviales sans grand dommage en transformant les rues en « oueds urbains superficiels ». Il faudra dans ce cadre repenser l'aménagement des rues de Bab el-Oued : élever le niveau des commerces par rapport à la chaussée, revoir l'organisation du stationnement des véhicules, détruire quelques bâtiments mal positionnés, etc. Le conférencier a notamment mis l'accent sur la nécessité d'établir des canaux de communication efficients afin d'informer à temps la population. Cet effort devra se maintenir dans la durée afin de rappeler aux citoyens que la garantie d'une sécurité à 100 % est impossible, sinon très relative et de permettre d'acquérir des réflexes appropriés en amont et en aval des catastrophes.



Adlene MEDDI L'Expression mardi 22 janvier 2002
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